_______Le
ciel et les cimes des arbres se laissent observer depuis le patio, comme un
film.
Un
film lent sans scénario ni protagonistes à part les avions qui passent et qui
laissent une trainée rose derrière eux.
La
nuit noircit peu à peu le bleu
la
nuit se mélange à l’or en bas de l’écran tendu par les mains de
l’univers ;
derniers
soupirs de l’astre, couleurs du désastre, de la catastrophe quotidienne.
Tous les chiens du quartier
jappent et se répondent, dérange le silence de cet instant paisible
et
me cassent les couilles tandis que je noircis les pages de mon Moleskin.
Les
boys boivent des daiquiris dans la chambre d’Ariel,
soit-disant
le cocktail préféré d’Hemingway
sous
le regard des dizaines de bouteilles alignées contre le mur.
Aujourd’hui,
les boys en ont eu pour 400 dollars. 400 boules de booze comme ils disent.
Un oiseau inconnu se pose sur la
ligne électrique en face de moi,
plumes
d’encre sur fond d’azur.
Il
repart aussitôt, verbalise SOLITUDE de son bec pointu.
En
même temps que lui et sur la même trajectoire, exacte, que les avions en
provenance d’Asie,
un
autre point lumineux gravit le ciel. Un boeing avec à son bord tout un tas
d’inconnus
qui
deviendront touristes une fois sur le tarmac ; ou qui seront heureux de
retrouver le bercail ou un Sion promis comme celui que je cherche.
Je
distingue les différentes lumières sous le ventre vide de kerozène de
l’appareil mais l’engin disparait sous le toit en taule du patio en signalant
SOLITUDE, lui aussi. Pas besoin d’épeler en nuages, j’ai l’habitude.
La tête dans un coussin, au bord
de la piscine, pas de quoi me plaindre, mon regard perd à nouveau un Boeing.
Puis un autre arrive et, bizarrement, je suis soulagé, comme quand on voit
enfin les lumières de la ville qu’on vise, avant d’atterrir, dans la nuit, le
cul talé dans un siège d’avion et les genoux qui envient la business class.
Soulagé, je l’observe autant que mon regard peut : son ventre métallique
se révèle chaque fois qu’il clignote, et je le perds. Voici un satellite,
trajectoire perpendiculaire sur la carte percée de l’univers…
Je
m’assoupi et des salopes imbues d’elles-mêmes dansent dans un rêve court ;
me laissent les approcher, les caresser, elles me laissent rêveur, bavant, une
demi-molle sans émotion ; et leurs cartes de visite. Puis, rien. Néant.
_______Les
sirènes des policiers –To protect and
serve– déchirent la nuit et me réveillent.
Ça
y est, elle est tombée la nuit. Y’a de l’encre partout, surtout sur mon
Moleskin. Les
sirènes m’ont réveillé en parcourant les boulevards alors j’écris des mots, des
monstres hybrides d’une main ivre.
Ça y est, elle est tombée, la
nuit et la lune cyclopéenne me regarde de son œil unique, révulsé et me
dit :
_______« T’as
vraiment cru qu’on pouvait voir les étoiles à LA, pauvre con ?
_______Dans le ciment du Boulevard
peut-être, sinon non. »...work in progress, comme on dit.